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Oxygène et plongée

Jean-Pierre Montagnon - Directeur Administratif de la FFESSM - Instructeur National

SUBAQUA N° 161 - CTN INFO N°28 - Novembre-décembre 1998

L'arrêté du 22 juin 1998 prévoir, au titre 3 "Matériel d'assistance et de secours", article 8, la présence sur le lieu de plongée, d'un ensemble comprenant un ballon auto-remplisseur à valve unidirectionnelle (BAVU) avec sac de réserve et d'une bouteille d'oxygène muni d'un mano détendeur et tuyau de raccordement au BAVU. Une application récente et plus contraignante de la réglementation change les conditions d'approvisionnement.

 

Oxygène et plongée, ces deux mots s'assemblent bien volontiers pour donner naissance à un excellent sujet d'examen de niveau IV. A la lecture, le candidat frémit puis essaie de rassembler tant bien que mal ses souvenirs parfois confus : pression partielle, loi de Dalton, effet Paul Bert, effet J. Lorrain-Smith, oxygénothérapie, réanimation, plongée mélange, nitrox, et plus récemment les très poétiques Snc, Otu et Updt (1)

Oui mais, l'oxygène est-il à la portée de tous ? Dans la nature peut-être mais de nombreux clubs ont rencontré d'énormes difficultés pour faire recharger les bouteilles d'oxygène destinées à leur trousse de secours. Pourquoi ?

En l'état actuel de la réglementation, les articles L 512 et L 596 du code de la santé publique réservent aux pharmaciens les activités de fabrication, de distribution en gros et de vente au détail de l'oxygène à usage médical. Autant dire que l'oxygène dit médical est un médicament dont la mise sur le marché nécessite une "Autorisation de Mise sur le Marché" (AMM) conformément à l'article L 601 du code de la santé publique. Cette autorisation concerne à la fois le contenant (la bouteille) et le contenu (l'oxygène gazeux).

Il faut savoir que l'oxygène médical a toujours été considéré comme un médicament. Il était cependant commercialisé sans autorisation de mise sur le marché (AMM) ou autorisation temporaire d'utilisation (ATU) par des fabricants qui n'avaient pas le statut d'établissement pharmaceutique. En France on ne badine pas avec la santé publique (!) et le ministère y a mis bon ordre en octroyant des AMM à un certain nombre de fabricants qui ont obtenu ce statut d'établissement pharmaceutique : Air Liquide Santé, Carboxyque Santé, Air Products Médical, Saga Médical et peut-être d'autres depuis.

Ces établissements ont désormais la responsabilité totale du contenant et du contenu et c'est pourquoi il ne peut plus y avoir en circulation de bouteilles personnelles. Nous devons maintenant utiliser des bouteilles qui appartiennent au laboratoire et louées aux utilisateurs. Ces bouteilles subissent, paraît-il, des traitements particuliers conformément à l'AMM et sont munies de nouveaux systèmes de robinet et de détente. Le but est, bien sûr, d'éviter les accidents lors des manipulations.

Nous n'avons pas tout perdu. Le ministère de la santé précise que l'autorisation de mise sur le marché n'ayant pas soumis l'oxygène à la réglementation des substances vénéneuses, ce qui serait quand même un comble, son achat au détail et son utilisation ne nécessitent pas la rédaction d'une prescription médicale. L'administration de l'oxygène en situation d'aide médicale d'urgence, la mise à disposition auprès de personnes qui utilisent elles-mêmes l'oxygène ne requiert pas non plus de prescription médicale et reste légale. Un doute, pourtant, me traverse l'esprit : Et si la personne est inconsciente ? On ne peut plus considérer qu'elle utilise elle-même l'oxygène !

La plongée aux mélanges grande utilisatrice d'oxygène est visée de plein fouet par ces mesures. L'oxygène médical étant destiné à être inhalé dans des indications thérapeutiques précises, les bouteilles ne doivent pas être manipulées pour la confection d'autres mélanges respiratoires. En résumé, le transvasement ou tout autre méthode de transfert est hors la loi.

Existe-t-il une parade ? Sans doute, la plongée industrielle l'a déjà trouvée depuis longtemps en utilisant de l'oxygène... industriel. Certains fabricants se préparent à proposer, en bouteilles de 50 litres, de l'oxygène qu'ils appellent "oxygène-plongée" ou "oxygen-dive". Trouvez l'astuce. En tout cas la plongée nitrox est sauvée.

Remerciements à Denis Jeant des Codes Vagnon et à Serge Ximénès du Grasm pour leur aide.

(1) Voir manuel nitrox de la Ffessm.

 

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